Burn out: vers une inscription au tableau des maladies professionnelles?

En d’autres termes, le burn out serait systématiquement présumé comme étant d’origine professionnelle.
Cet appel a été relayé en juillet 2014 par l’adoption d’une résolution appelant « l’ensemble des pouvoirs publics et des partenaires sociaux à réfléchir aux modalités qui permettraient une reconnaissance en maladie professionnelle des affections résultant d’une exposition à des risques psychosociaux d’origine professionnelle, et qui se caractérisent notamment par un état de stress post-traumatique, d’épuisement manifeste, par une dépression ou par des complications somatiques spécifiques ».
Un des buts d’une telle reconnaissance est de transférer les coûts de ce type d’affection sur les employeurs. Ainsi la résolution « met en exergue que dans la situation actuelle, il apparaît inique que la branche maladie prenne en charge des affections qui découlent de la réalisation de risques psychosociaux d’origine professionnelle, alors que la branche AT-MP, financée à 97 % par les cotisations patronales, semble plus légitime au regard de la nature des risques précités ».
La proposition est sous tendue par un présupposé perturbant : l’employeur ne prendra vraiment en compte la santé mentale de ses salariés que lorsque sa responsabilité sera systématiquement mise en jeu. Et en l’espèce, il sera engagé financièrement sans discussion possible, dès constat d’une situation de burn out. A lui de tout faire pour l’éviter?!?
Alors, bien entendu, et la cause est acquise depuis longtemps, l’employeur doit avoir comme objectif la prévention des risques à tous les stades de la relation de travail : il doit veiller à ce que son organisation du travail ne soit pas « pathogène ». Il s’agit d’une obligation de résultat : la jurisprudence sanctionne l’employeur pour tout manquement, dès lors qu’un lien entre le travail et l’état psychique du salarié peut être établi. Mais l’inscription au tableau des maladies professionnelles de « l’épuisement professionnel », ou « de l’état de stress répétés conduisant à une situation traumatique » ou encore de « l’anxiété généralisée » pose le problème de sa caractérisation.
La santé mentale est en effet la résultante de plusieurs facteurs : la vie professionnelle devenue routine, la personnalité plus ou moins anxieuse, un rythme de vie soudain plus adapté aux contraintes personnelles, une vie privée, familiale, amicale moins satisfaisante, voire agressante, … L’apparition des troubles est individualisée, elle dépend des circonstances de vie de chacun et chaque cas relève d’une situation individuelle différente. Or, la définition précise de la pathologie est un préalable obligatoire à l’inscription au tableau des maladies professionnelles.
La vraie question qui précède donc cette inscription du burn out est la suivante: est-il possible de définir d’un point de vue pathologique les symptômes qui différencient un épuisement au travail ou une dépression d’origine professionnelle d’un état d’épuisement ou d’une dépression ayant des causes extérieures à la relation de travail ?
L’obligation générale de prévention et de résultat qui pèse sur l’employeur ne risque-t-elle pas de se transformer en obligation individualisée de garantie du bien-être humain des salariés ? Dans ce cas, quels seront les droits et pouvoirs de l’employeur pour connaître de ce contexte global, protégé par des principes indiscutables tels que le droit à la vie privé, ou encore le secret médical?
C.Candon/ C. Stievenard