Droit d’alerte économique du CSE, l’importance des explications de l’employeur
En cette période d’instabilité économique, les entreprises pourraient constater une mise en œuvre plus fréquente par leur comité social et économique (CSE) de la procédure d’alerte économique.
Cette procédure, qui relève des attributions d’ordre économique du CSE, est destinée à permettre aux représentants du personnel de réagir lorsque la situation économique de l’entreprise leur semble détériorée de manière importante… et sans doute que les choix qui sont faits, mettent in fine en danger l’emploi des salariés qu’ils représentent.
Ainsi, selon les articles L. 2312-63 et suivants du code du travail, lorsqu’il a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, le CSE peut demander des explications à l’employeur. En cas d’explications qui lui semblent insuffisantes, le CSE peut alors déclencher une procédure d’alerte. A ce titre, il élabore alors un rapport avec, s’il le souhaite, l’assistance d’un expert-comptable rémunéré par l’employeur. Ce rapport, in fine, émet un avis sur l’opportunité de saisir de ses conclusions l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance dans les sociétés qui en sont dotées ou d’en informer les associés dans les autres formes de sociétés.
Le pouvoir d’alerte du CSE est donc conditionné par la notion de « faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise ». En l’absence d’indicateurs donnés par les textes, l’étude de la jurisprudence permet d’en appréhender le domaine, par exemple :
- la fermeture d’un laboratoire remettant en cause les objectifs et missions traditionnels de la caisse régionale d’assurance maladie (Cass. soc. 19-2-2002 n° 00-14.776) ;
- un projet de délocalisation d’une ligne de production (TGI Nanterre 10-9-2004 n° 04-2484),
- une situation de l’entreprise susceptible d’affecter le maintien de l’emploi (CA Paris 23-10-2008 n° 07-13994)….
Lorsque le juge est saisi, il lui revient de rechercher s’il existe des éléments objectifs et sérieux de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise.
Un arrêt récent de la Cour de cassation offre un nouvel exemple d’un droit d’alerte juridiquement justifié.
La Haute juridiction constate que le Comité d’entreprise (la décision est évidemment transposable au CSE) a exercé son droit d’alerte sur la base de la constatation d’un déficit croissant depuis plusieurs années consécutives, attesté par des rapports d’experts sur la situation économique de l’entreprise. Face à l’absence de réponse pertinente de la direction de nature à expliquer le déficit et les moyens envisagés pour y remédier, le Comité avait valablement mis en œuvre son alerte économique.
Cass. soc., 7 juill. 2021, no 19-15.948