Harcèlement : l’enquête devient incontournable…
En cas de harcèlement, l’employeur ne peut s’exonérer de sa responsabilité que s’il démontre, d’une part, avoir pris les mesures immédiates permettant de faire cesser le harcèlement, et d’autre part, avoir mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement (Cass. soc. 1er juin 2016 n° 14-19.702).
Il est donc exigé une prévention en amont et une intervention immédiate si un cas de harcèlement se produit.
Par ailleurs, il pèse sur l’employeur, de façon générale, une obligation de sécurité qui induit une obligation de prévention des risques professionnels… dont le harcèlement.
Un arrêt du 27 novembre 2019 ouvre au salarié la possibilité de mettre en cause la responsabilité de son employeur sur le terrain de son obligation générale de sécurité alors même que le harcèlement n’est pas retenu. La Cour de cassation considère ainsi que l’employeur, saisi d’une plainte pour harcèlement, doit diligenter des investigations, non seulement au titre de son obligation spéciale de prévention des agissements de harcèlement moral, mais également au titre de son obligation générale de sécurité.
En l’espèce, une salariée adresse un courrier à son employeur, se plaignant du harcèlement qu’elle subit de la part de sa supérieure hiérarchique. Un mois et demi après ce courrier, elle est licenciée pour insuffisance professionnelle. Elle saisit le CPH et demande des indemnités réparant la nullité du licenciement pour harcèlement d’une part et, d’autre part, des indemnités au titre de la violation par l’employeur de son obligation de sécurité. Elle considère, en effet, que l’employeur aurait dû mener une enquête interne lors de sa plainte afin de vérifier la réalité des agissements invoqués.
Les juges du fond reconnaissent la nullité du licenciement considérant que la lettre de licenciement reprochait également à la salariée d’avoir dénoncé un harcèlement. Un tel reproche dans une lettre de licenciement entraine l’annulation du licenciement en vertu de la protection légale accordée par l’article L.1152-2 du code du travail au salarié qui dénonce de bonne foi un harcèlement.
En revanche, ils considèrent que le harcèlement n’est pas établi et qu’il ne peut en conséquence « être reproché à l’employeur de ne pas avoir diligenté une enquête et par là même d’avoir manqué à son obligation de sécurité » et la déboutent de sa demande de dommages et intérêts.
La Cour de cassation censure ce point : « l’obligation de prévention des risques professionnels (…) est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral (…) et ne se confond pas avec elle ».
Ainsi, les juges du fond ne pouvaient débouter la salariée de sa demande fondée sur l’obligation de sécurité au seul motif que le harcèlement n’était pas constitué.
Il en résulte que, en cas de dénonciation de harcèlement, l’employeur doit diligenter une enquête, d’une part au titre des mesures qu’il doit prendre pour faire cesser les agissements de harcèlement, mais également au titre de son obligation générale de sécurité.
L’enquête devient ainsi un passage incontournable.
Cass., soc., 27 novembre 2019, nº 18-10.551