Salarié protégé : le défaut de saisine de l’inspecteur du travail au terme du CDD
En principe, dans le cas des salariés protégés, lorsque l’employeur envisage de ne pas renouveler un CDD comportant une clause de renouvellement, il doit préalablement à l’échéance du contrat, saisir l’inspecteur du travail d’une demande d’autorisation de non renouvellement (articles L. 2412-2 et suivants du code du travail).
Notons que, jusqu’à la loi de ratification des ordonnances Macron du 29 mars 2018, l’inspecteur du travail devait être saisi dans le délai d’un mois avant l’arrivée du terme du contrat. Depuis cette loi, ce délai a été supprimé. L’article L.2421-7 du code du travail prévoit désormais que la rupture du CDD d’un salarié protégé est soumise à la même procédure que celle prévue en cas de licenciement. Or, l’arrivée à échéance d’un CDD n’est pas à proprement parlé une rupture de contrat… Est-ce à dire que la saisine de l’inspection du travail ne serait plus obligatoire lors de l’échéance d’un CDD ne comportant pas de clause de renouvellement ? Rien n’est moins sûr…. Aussi, en attendant une position jurisprudentielle claire, il est largement recommandé de continuer à saisir l’inspecteur du travail préalablement à l’échéance du CDD.
La jurisprudence va plus loin que les textes et oblige l’employeur à solliciter cette autorisation qu’il y ait ou non une clause de renouvellement dans le contrat de travail (cass. soc. 23 octobre 2012, n°11-19.210).
Elle confirme cette position dans un arrêt récent du 5 juin 2019 (n°17-24.193 FS-PB).
Or, l’extension de cette autorisation aux CDD ne pouvant pas être renouvelés est pour le moins surprenante…
La haute juridiction confirme également la sanction de cette obligation (en partie jurisprudentielle) : si l’employeur n’a pas saisi l’inspecteur du travail, qui seul peut constater l’absence de discrimination, l’arrivée du terme n’entraîne pas la rupture du contrat qui se transforme donc en CDI à cette date ; en conséquence, la rupture du contrat de travail est nulle.
Le coût pour l’employeur est alors considérable :
- il y a d’une part violation du statut de salarié protégé, et donc obligation de verser une indemnité équivalente à la totalité des salaires qu’il aurait dû percevoir durant la période couvrant son éviction à la fin de la période de protection en cours. Rappelons qu’il s’agit d’une sanction, donc il n’y a pas déduction des allocations chômage que le salarié aurait pu percevoir entretemps.
- d’autre part, l’employeur doit indemniser le salarié de son licenciement illégal, ce qui conduit à lui verser un montant au moins égal à l’indemnité d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Toutefois, la Cour de cassation ajoute une précision inédite : le salarié ne peut pas demander, en outre, le versement de l’indemnité de requalification prévue par l’article L.1245-2 du code du travail (au moins égale à un mois de salaire).
Maigre consolation…
Isabelle Mathieu