Salarié protégé : mandat non révélé mais indemnités dues !
La Cour de cassation a mis les choses au point : le salarié protégé du fait d’un mandat extérieur à l’entreprise a une obligation d’information s’il veut bénéficier de la protection. En effet, s’il n’a pas révélé à son employeur, au plus tard le jour de l’entretien préalable, l’existence d’un mandat extérieur, l’employeur ne peut être condamné pour n’avoir pas respecté la procédure spéciale de licenciement des salariés protégés (Cass. Soc 14 septembre 2012 n°11-21.307).
Mais attention toutefois, l’existence de ce mandat extérieur peut être lourde de conséquences, même si l’employeur n’en avait pas connaissance.
Un arrêt récent, rendu à propos d’un conseiller du salarié, permet d’en prendre la mesure.
En l’espèce, un salarié est inscrit sur la liste des conseillers du salarié. Son mandat doit prendre fin le 10 avril 2012. Il est donc protégé es qualité jusqu’au 10 avril 2013 (soit 12 mois suivant la fin de son mandat). Son employeur a connaissance de ce mandat. Il le licencie pourtant pour inaptitude avec impossibilité de reclassement par courrier en date du 17 janvier 2013, sans demande préalable d’autorisation de licenciement auprès de l’inspection du travail…licenciement nul sans aucun doute.
Mais, ce que l’employeur ignore, c’est que le salarié avait renouvelé sa demande d’inscription comme conseiller du salarié et obtenu un deuxième mandat à compter du 12 septembre 2012, pour trois années. Au titre de ce nouveau mandat, le salarié pouvait donc bénéficier d’une protection courant jusqu’au 12 septembre 2016.
L’employeur admet avoir violé le statut protecteur en vertu du premier mandat, mais estime que le deuxième mandat ne peut lui être opposé dans la mesure où il n’en avait pas connaissance.
En effet, l’enjeu du litige se situe dans le montant de l’indemnité due en violation du statut protecteur :
Selon une jurisprudence constante, le salarié licencié en violation de son statut protecteur qui ne demande pas sa réintégration a droit au versement d’une indemnité forfaitaire égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection en cours (dans la limite de 30 mois pour un conseiller salarié).
Mais quelle date retenir : le premier mandat connu de l’employeur (soit quelques trois mois restant à courir) ou le deuxième mandat (qui doit prendre fin en septembre 2015, soit une indemnisation de 30 mois de salaire !) ? Autrement dit, pour évaluer les conséquences financières de la violation du statut protecteur, doit on tenir compte de l’existence de ce deuxième mandat, bien que l’employeur n’en ait pas eu connaissance ?
La Cour de cassation décide que l’obligation d’information du salarié sur l’existence d’un mandat ne s’étend pas aux conséquences pécuniaires attachées à la violation du statut protecteur.
Autrement dit, en cas de pluralité de mandat dont un au moins est connu de l’employeur, si ce dernier viole le statut protecteur, tous les mandats existants seront pris en compte pour évaluer le montant de la sanction pécuniaire, peu important que l’employeur en connaisse ou pas l’existence.
La sanction est logique. Si l’employeur est dispensé d’appliquer une procédure spéciale lorsqu’il ne connait pas le statut de salarié protégé de son salarié, il n’en est pas de même lorsqu’il viole délibérément la loi.
Cass. soc. 30 juin 2016 n° 15-12.982