Question de loyauté
Un salarié est licencié pour faute grave pour avoir créé une société directement concurrente à son employeur. Il saisit le juge arguant que le simple fait de détenir des parts (en l’espèce 45 %) dans une société concurrente ne constitue pas un manquement à l’obligation de loyauté.
En effet dans un litige similaire antérieur, la Cour de cassation a pu considérer que sans preuve d’une activité personnelle au sein de la société concurrente, le simple fait pour le salarié d’en avoir acquis des parts ne caractérisait pas un manquement à l’obligation de loyauté (cas. Soc. 16 septembre 2009 n°08-41735).
Il semble que les temps aient changé. La Cour de cassation confirme cette fois-ci le manquement à l’obligation de loyauté et admet la faute grave : le salarié ayant, alors qu’il était au service de son employeur et sans l’en informer, créé une société dont l’activité était directement concurrente de la sienne, avait manqué à son obligation de loyauté, peu important que des actes de concurrence déloyale ou de détournement de clientèle soient ou non établis.
Point n’est besoin de prouver des actes de concurrence ou de détournement de clientèle, le simple fait d’être associé dans une société concurrente suffit.
La différence d’appréciation des magistrats entre ces 2 décisions à quelques années d’intervalle tient-elle au fait que le salarié en l’espèce avait créé la société, qui portait d’ailleurs son nom ? Ou s’agit-il d’une appréciation différente de la loyauté, qui conduit à penser qu’elle ne peut plus exister dès lors qu’un salarié a accepté un affectio societatis dans une société concurrente ? … nous l’espérons !.
La précision apportée par les hauts magistrats sur l’information que le salarié aurait pu donner à son employeur de cette création suscite également une interrogation… Il est certain que si le salarié informe son employeur de cette création, c’est un acte de loyauté. Mais, toutefois, le fait de révéler un possible conflit d’intérêt met l’employeur dans une situation très délicate… comment peut-il alors garder confiance ?
Cass. soc., 30 nov. 2017, pourvoi no 16-14.541