La conciliation devant le conseil de prud’hommes

« Le conseil de prud’hommes (CPH) règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail (article L.1411-1 du code du travail). »

La conciliation est, en principe, une des compétences premières du CPH. Ainsi, l’article R.1454-10 du code du travail, dans le titre qui traite de la procédure devant le CPH, dispose que :

« Le bureau de conciliation et d’orientation entend les explications des parties et s’efforce de les concilier. Un procès-verbal est établi.

En cas de conciliation totale ou partielle, le procès-verbal mentionne la teneur de l’accord intervenu. Il précise, s’il y a lieu, que l’accord a fait l’objet en tout ou partie d’une exécution immédiate devant le bureau de conciliation et d’orientation.

A défaut de conciliation totale, les prétentions qui restent contestées et les déclarations faites par les parties sur ces prétentions sont notées au dossier ou au procès-verbal par le greffier sous le contrôle du président. »

Par ailleurs, le code du travail prévoit spécifiquement la possibilité de concilier devant le bureau de conciliation et d’orientation (BCO) du CPH lors des contestations sur la cause du licenciement, qui reste le cas le plus fréquent des saisines du CPH (article L.1235-1 du code du travail) :

 « En cas de litige, lors de la conciliation prévue à l’article L. 1411-1, l’employeur et le salarié peuvent convenir ou le bureau de conciliation et d’orientation proposer d’y mettre un terme par accord. Cet accord prévoit le versement par l’employeur au salarié d’une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en référence à un barème fixé par décret en fonction de l’ancienneté du salarié.

Le procès-verbal constatant l’accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail prévues au présent chapitre… ».

Certains CPH, et notamment à Paris, tirent une conclusion étonnante de l’existence de textes particuliers sur la conciliation en matière de licenciement. Ils estiment en effet que lorsque le litige en cause est relatif à une contestation de licenciement, l’accord intervenu en BCO ne couvre que les indemnités pour licenciement abusif, à l’exclusion de toute autre somme qui pourrait en conséquence encore être demandée par le salarié postérieurement à la signature du procès-verbal de conciliation. Et ce, en dépit des textes de procédure (article L.1411-1 et R.1454-10 du code du travail) leur attribuant une compétence générale en matière de conciliation pour éteindre définitivement un litige.

Ainsi, une salariée a pu saisir un conseil de prud’hommes et obtenir le paiement d’une indemnité de non concurrence, alors qu’une conciliation, relative à la rupture de son contrat de travail, avait eu lieu et que l’accord signé devant le BCO, prévoyait expressément la renonciation à toute réclamation et indemnité relatives à la rupture du contrat. La salariée fait valoir qu’un « procès-verbal de conciliation (…) ne peut couvrir que la rupture du contrat de travail, c’est-à-dire les indemnités pour licenciement irrégulier ou abusif, et qu’ainsi les autres sommes éventuellement dues au salarié, dont la contrepartie à la clause de non- concurrence, qui ne relèvent pas du même chapitre du Code du travail, ne [peuvent être visée]. » 

L’employeur a fait appel de la décision, et, fort heureusement, la cour d’appel de Paris a considéré que le BCO, même saisi dans le cadre d’un litige sur la cause d’un licenciement en application de l’article 1235-1 du code du travail, ne perdait pas sa compétence générale pour régler les autres différents issus de la relation de travail. « En conséquence, les parties ayant volontairement comparu devant ce bureau sur le fondement du texte précité, peuvent librement étendre l’objet de leur conciliation à des questions dépassant celles des seules indemnités de rupture. » 

CA Paris, pôle 6, ch. 9, 22 juin 2022, n° 21/00102