Droit d’agir en justice : la limite de la protection

Le droit d’agir en justice est une liberté fondamentale. Aussi, le licenciement intervenu en raison d’une action en justice introduite ou susceptible de l’être par un salarié à l’encontre de son employeur est nul (Cass. soc. 3 février 2016 n°14-18.600).

Mais si le droit est protégé, l’abus de droit ne l’est plus. 

Un arrêt de la Cour de cassation du 7 décembre 2022 illustre un cas d’abus de droit en la matière.

En l’occurrence, un salarié, conducteur de métro, est révoqué pour avoir menacé son supérieur de déposer plainte contre lui s’il persistait dans sa volonté de le recevoir dans le cadre d’un entretien disciplinaire. 

Il saisit le juge prud’homal et fait valoir la nullité de sa révocation intervenue en violation de son droit à ester en justice. Il est débouté en première instance puis par la cour d’appel. 

Les juges du fond estiment en effet que « la menace de déposer plainte auprès des services de police ne résultait pas d’une authentique volonté d’agir en justice mais constituait une nouvelle illustration, dans un contexte global de menaces à l’endroit de ses collègues et supérieurs, de la logique d’intimidation dont le salarié avait déjà fait preuve par le passé ». Ils relèvent que le salarié avait déjà usé de cette menace antérieurement sans la mettre à exécution en disant à son supérieur « soit vous me faites le courrier, soit je vais porter plainte pour harcèlement au commissariat ».

Ils soulignent également une autre menace antérieure où le salarié avait affirmé que si son supérieur le sanctionnait, il se mettrait en maladie et irait porter plainte.

La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu l’abus de droit de cet ensemble de faits.

La menace de saisir la justice dans un contexte de désaccord n’est pas a priori constitutive d’un abus, les circonstances sont déterminantes pour caractériser la mauvaise foi du salarié. 

Cass. soc. 7 décembre 2022 n°21-19280