Inaptitude, quelques précisions du juge sur la dispense de reclassement et la contestation de l’avis

En cas d’inaptitude du salarié, le médecin du travail peut estimer que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi. L’employeur est alors dispensé de rechercher un reclassement.

La Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 8 février 2023 (n°21-19.232) que l’avis du médecin dans ce cas dispense l’employeur de rechercher un reclassement quand bien même l’entreprise appartiendrait à un groupe.

Elle vient dernièrement d’inviter à bien lire la mention inscrite par le médecin afin de ne pas se tromper sur la portée à lui donner.

En l’espèce, le médecin avait bien coché la case mentionnant que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi » mais avait précisé que l’inaptitude faisait obstacle sur le site à tout reclassement dans un emploi.

Elle en déduit que le médecin du travail avait entendu limiter l’impossibilité de reclassement au site sur lequel travaillait le salarié. L’employeur ne pouvait pas licencier le salarié sans rechercher une solution de reclassement sur les autres sites de l’entreprise (Cass. soc. 13 décembre 2023 n°22.19-606).

Un autre arrêt du même jour rappelle qu’en cas de contestation de l’avis d’inaptitude devant le conseil de prud’hommes, le médecin mandaté par l’employeur ne pourra obtenir la communication par le médecin inspecteur du travail des seuls éléments médicaux ayant fondé les avis du médecin du travail. 

Pour mémoire, la décision d’inaptitude du médecin du travail peut être contestée en référé devant le conseil de prud’homme (article L.4624-7 du code du travail). Le conseil de prud’hommes peut, dans ce cadre, examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s’est fondé pour rendre son avis (Cass. soc, avis du 17 mars 2023 n°21-70.002). 

Le CPH peut confier toute mesure d’instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l’éclairer sur les questions de faits relevant de sa compétence.

Les éléments médicaux ayant fondé la décision du médecin sont couverts par le secret médical. Aussi, afin de respecter le principe du contradictoire, l’employeur peut mandater un médecin qui pourra demander communication des éléments médicaux ayant fondé l’avis du médecin du travail.

La Cour de cassation estime donc que le médecin inspecteur du travail peut légitimement refuser de communiquer au médecin mandaté par l’employeur des éléments du dossier médical de santé au travail du salarié qui ne sont ni des éléments médicaux ni des éléments ayant fondé l’avis d’inaptitude contesté (Cass. soc. 13 décembre 2023 n°21-22.401).

Cass. soc. 13 décembre 2023 n°22.19-606

Cass. soc. 13 décembre 2023 n°21-22.401