Droit à la preuve et secret médical

Au nom du droit à un procès équitable, la jurisprudence a été amenée à considérer comme recevable une preuve illicite ou déloyale. Les exemples sont principalement intervenus en matière de surveillance illicite et en cas d’atteinte à la vie privée. 

La recevabilité de la preuve est alors conditionnée à la notion de nécessité et au principe de proportionnalité.

Qu’en est-il lorsqu’une preuve est produite en violation du secret médical ?

Selon l’article L.1110-4, alinéa 2, du code de la santé publique, le secret médical couvre l’ensemble des informations concernant la personne, venues à la connaissance du professionnel, de tout membre du personnel de ces établissements, services ou organismes et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s’impose à tous les professionnels intervenant dans le système de santé.

Notons que l’atteinte au secret médical, comme toute atteinte au secret professionnel, est un délit visé par l’article 226-13 du code pénal, puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

La production d’un document révélant des informations couvertes par le secret médical est donc impossible en principe.

La Cour de cassation a admis qu’un salarié puisse produire en justice, pour assurer sa défense, les documents de l’entreprise dont il a connaissance à l’occasion de ses fonctions, même couverts par le secret professionnel, dès lors que cela est strictement nécessaire à l’exercice des droits de la défense du salarié dans le litige l’opposant à son employeur (Cass. Soc, 5 juillet 2011, n° 09-42.959). 

La Cour de cassation reprend cette solution dans un arrêt du 20 décembre 2023, dans une affaire où la salariée avait produit un document portant atteinte au secret médical : « employeur ou salarié peuvent produire en justice des documents couverts par le secret médical si cette production est indispensable à l’exercice des droits de la défense et proportionnée au but poursuivi. »

Ainsi que le souligne la Cour de cassation dans sa lettre sociale n°22, l’apport de l’arrêt est double. D’une part, il n’évoque plus les droits de la défense du salarié, ce qui signifie que l’employeur peut également se prévaloir de son droit à la preuve pour produire des éléments couverts par le secret médical. D’autre part, il introduit un contrôle de proportionnalité, s’agissant de pièces qui portent sur des données personnelles.

Cass. soc., 20 décembre 2023, n° 21-20.904