La compétence étendue du bureau de conciliation et d’orientation

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Article L.1235-1 du Code du travail

Selon l’article L.1235-1 du Code du travail, l’employeur et le salarié peuvent mettre un terme à leur litige par un accord établi et signé devant le bureau de conciliation et d’orientation du Conseil de prud’hommes. Cet accord prévoit le versement d’une indemnité forfaitaire de conciliation dont le montant est déterminé par un barème fixé selon l’ancienneté du salarié.

Avantages de l'indemnité forfaitaire

Le régime social et fiscal favorable appliqué à cette indemnité, ainsi que l’absence d’application de tout différé d’indemnisation des allocations chômage, sont autant d’arguments en faveur de ce mode de résolution d’un litige.

Incertitude sur les situations visées

Toutefois, une incertitude persiste sur les situations visées par ce mode de résolution. Cette incertitude résulte des termes de l’article précité, selon lequel « l’accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail prévues au présent chapitre ». Il s’agit du chapitre V du Code du travail, afférent aux « contestations et sanctions des irrégularités du licenciement ».

Cas spécifique : litige sur la clause de non-concurrence

Dans une affaire jugée le 24 avril dernier :

  • Une salariée avait signé avec son ancien employeur un procès-verbal de conciliation aux termes duquel ce dernier s’était engagé à verser une indemnité forfaitaire.
  • Ce procès-verbal précisait qu’il « valait renonciation à toutes réclamations et indemnités et entraînait désistement d’instance et d’action pour tout litige né ou à naitre découlant du contrat de travail ».

Contestation et décision de la Cour de cassation

Quelques mois plus tard, la salariée saisissait de nouveau le Conseil de prud’hommes pour obtenir le paiement de la contrepartie financière de sa clause de non-concurrence. Elle faisait valoir que le procès-verbal de conciliation ne pouvait valoir renonciation à d’autres droits que ceux tirés exclusivement de son licenciement.

La Cour de cassation, confirmant la décision de la Cour d’appel, n’a pas suivi ce raisonnement. Elle rappelle, notamment sur le fondement de l’article L.1411-1 du Code du travail, que « le bureau de conciliation et d’orientation conserve une compétence d’ordre général pour régler tout différend né à l’occasion du contrat de travail ». En ce sens, « les parties qui comparaissent volontairement devant ce bureau peuvent librement étendre l’objet de leur conciliation à des questions dépassant celles des seules indemnités de rupture ».

Portée de l'accord de renonciation

Ainsi, dès lors que l’accord valait renonciation à toutes réclamations et indemnités et entraînait désistement d’instance et d’action, la Cour considère que les obligations au titre de la clause de non-concurrence étaient comprises dans l’objet de l’accord. Une décision contraire aurait mis en péril l’intérêt pour les parties de recourir à de tels accords, ceux-ci ayant usuellement vocation à mettre un terme à tout litige avec un même salarié.

Importance de la précision des termes de l'accord

Pour se prémunir de toute difficulté, il est important de porter une attention particulière aux termes de l’accord, notamment en ce qui concerne la définition de son objet. Si cette décision apporte une clarification rassurante, un doute subsiste sur la possibilité d’étendre la compétence du bureau de conciliation et d’orientation à des litiges sans lien avec un licenciement.

Cass. soc., 24 avril 2024, n°22-20.472