Manquement à l’obligation de prévention du harcèlement moral : pas de nullité du licenciement

En vertu du principe « pas de nullité sans texte », les juges ne peuvent annuler un licenciement à défaut de disposition légale prévoyant la nullité.

En matière de harcèlement moral, c’est l’article L.1152-3 du code du travail qui prévoit que toute rupture du contrat de travail intervenue en violation des articles L.1152-1 (aucun salarié ne doit subir des agissements de harcèlement moral) et L.1152-2 (protection du salarié qui dénonce un harcèlement moral) est nulle.

Par ailleurs, une obligation de prévention du harcèlement moral pèse sur l’employeur (article L.1152-4 du code du travail). 

La Cour de cassation rappelle que les manquements de l’employeur aux obligations de sécurité ou de prévention du harcèlement moral ne sont pas une cause de nullité de licenciement.

En l’occurrence, une infirmière est licenciée, l’employeur lui reproche de transformer les transmissions avec les autres équipes en interrogatoires déstabilisants pour les collègues et de refuser de tenir compte de leur avis et diagnostics.

Elle conteste son licenciement et fait valoir qu’elle subissait un harcèlement de la part de ses collègues et que l’employeur a manqué à son obligation de prévention, n’ayant pas ou trop peu réagi, d’une part à une plainte collective pointant des problèmes organisationnels, et d’autre part à une fiche de signalement qu’elle a rédigée se plaignant de souffrance au travail et se disant harcelée et agressée par une collègue qu’elle ne nommait pas.

La cour d’appel reconnait le harcèlement et déclare le licenciement nul, l’employeur ayant failli à son obligation de prévention imposée par l’article L.1152-4 du code du travail. Les juges relèvent que le licenciement procède directement des manquements de l’employeur en matière de prévention du harcèlement, considérant que le comportement reproché à la salariée se rattachait à des déficiences repérées et non traitées par l’employeur dans l’organisation générale de l’entreprise et que les conflits imputés à la salariée ont été rendus possibles par les carences organisationnelles de l’employeur dans son pouvoir de direction. 

La décision est sanctionnée par la Cour de cassation : le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité ou à l’obligation de prévention du harcèlement moral instituée par l’article L. 1152-4 du code du travail n’est pas de nature à justifier la nullité du licenciement. Le licenciement ne pouvait être sanctionné que par l’absence de cause réelle et sérieuse.

La consigne est donc fermement rappelée : pas de nullité sans texte.

Cass. soc. 14 février 2024 n°22-21.464