Articulation entre droit à la preuve et respect des dispositions du RGPD en matière de discrimination syndicale

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Un représentant du personnel a saisi la juridiction prud’homale estimant avoir fait l'objet d'une discrimination syndicale en matière d'évolution salariale et professionnelle.

Ce dernier sollicitait la production de bulletins de paie de salariés, demande à laquelle a fait droit le conseil de prud’hommes en ordonnant à la société de produire les historiques de carrière de neuf salariés nommément désignés, ainsi que leurs bulletins de salaire.

L'employeur a contesté ce jugement en invoquant le droit à la protection des données personnelles de ces salariés garanti par le RGPD.

La communication des bulletins de paie est possible au regard du droit à la preuve

La Cour de cassation rappelle que le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu et doit être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, notamment le droit à un recours effectif.

Ainsi, les parties à une procédure juridictionnelle civile doivent être en mesure d’accéder aux preuves nécessaires pour établir le bien-fondé de leur grief, qui peuvent éventuellement inclure des données à caractère personnel des parties ou des tiers.

En conséquence, le juge doit, dans un premier temps, rechercher si cette communication est nécessaire à l’exercice du droit à la preuve de la discrimination alléguée et proportionnée au but poursuivi, au besoin en cantonnant le périmètre de la production des pièces sollicitées.

Si cette communication est nécessaire, le juge doit, dans un second temps, veiller au principe de minimisation des données à caractère personnel prévu à l’article 5 du RGPD.

En d’autres termes, le juge peut ordonner, au besoin d’office, l’occultation, sur les documents à communiquer au salarié, de toutes les données à caractère personnel des salariés de comparaison non indispensables à l’exercice du droit à la preuve et proportionnées au but poursuivi.

Enfin, le juge doit également faire injonction aux parties de n’utiliser ces données personnelles contenues dans les documents communiqués qu’aux seules fins de l’action en discrimination.  

Cass. 2e civ, 3 octobre 2024, n°21-20.979

Morgane DIEN