Selon une jurisprudence constante, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié dans le cadre d’une instance judiciaire, est atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur, laquelle ne peut résulter que de la connaissance qu’il avait de la fausseté des faits relatés.
En effet, la liberté de témoigner, garantie d’une bonne justice, est une liberté fondamentale, protégée en tant que telle. Ainsi, seule la mauvaise foi du témoin est susceptible de lever la protection. Toutefois, la Cour de cassation est très restrictive sur cette notion de mauvaise foi, comme en témoigne un arrêt du 14 juin 2023.
En l’espèce, une salariée, manager de magasin, adresse un rapport à son employeur, se plaignant du comportement d’un salarié travaillant sous sa responsabilité, lui reprochant de tout faire pour la déstabiliser et la démotiver, de ne pas rester à son poste pour servir les clients, de ne pas s’impliquer dans son travail en refusant de travailler les dimanches avant Noël, de n’avoir aucune conscience professionnelle et de participer à la création d’une ambiance glaciale, sans sourire et sans dialogue… le dit salarié est licencié pour faute grave, notamment en raison du contenu de ce rapport. Il conteste son licenciement, et à la salariée atteste alors en sa faveur en écrivant : « M. [Y] n’a commis aucune faute grave pendant son activité en magasin. Les accusations portées contre lui ne sont aucunement justifiées. Il est un vendeur exemplaire apprécié de la clientèle. »
La salariée est alors licenciée en raison du contenu de son attestation.
La cour d’appel retient la mauvaise foi de la salariée dans la mesure où elle savait que son subordonné avait été licencié pour faute grave motivée, entre autres, par ses actes d’insubordination à son égard et sur la base de son rapport établi seulement une vingtaine de jours auparavant.
Mais la Cour de cassation considère que la cour d’appel ne pouvait retenir la mauvaise foi sans avoir constaté le bien-fondé des griefs contenus dans le rapport, et donc caractérisé le fait que la salariée connaissait la fausseté des faits relatés dans son attestation litigieuse.
La contradiction des deux témoignages est insuffisante en elle-même, il fallait démontrer que le deuxième spécifiquement était mensonger.
Cass. soc. 14 juin 2023, n°22-16.977