La liberté fondamentale d’ester en justice

Un salarié ne peut subir aucune mesure de rétorsion pour avoir introduit une action en justice contre son employeur. Un licenciement intervenu concomitamment à une action en justice sera nul s’il apparait qu’il constitue une mesure de rétorsion. 

En principe, le seul fait qu’une action en justice exercée par le salarié soit contemporaine d’une mesure de licenciement ne fait pas présumer que celle-ci procède d’une atteinte à la liberté fondamentale d’agir en justice. 

Si la lettre de licenciement ne contient pas de référence à l’action engagée par le salarié, que les faits sont établis et sérieux, la charge de la preuve du lien entre le licenciement et l’action en justice pèse sur le salarié (Cass. soc., 17 mai 2023, n°22-15.143)

A l’inverse, si la lettre de licenciement fait référence à l’action en justice et/ou si les faits ne sont pas établis ou sérieux alors il reviendra à l’employeur de prouver que le licenciement n’est pas une mesure de rétorsion.

Toutefois, la simple évocation de l’action en justice à titre liminaire afin de placer le contexte du licenciement ne devrait pas impliquer une suspicion de mesure de rétorsion (voir le cas de l’évocation d’une plainte de harcèlement – notre articleCass. soc. 4 octobre 2023 n°22-12.387)

En revanche, si l’on peut déduire des termes de la lettre que l’action en justice en est l’un des griefs, la nullité est encourue, quels que soient les autres griefs.

Ainsi, dans une affaire récente, un salarié est convoqué à un entretien préalable en vue d’un licenciement. Il saisit ensuite le conseil de prud’homme d’une demande de résiliation de son contrat de travail. Il est licencié et la lettre de licenciement évoque la démarche judiciaire du salarié, l’employeur estimant qu’elle visait à masquer ses fautes en éludant le fond pour l’empêcher de discuter du motif de la procédure disciplinaire qui le concernait.

La cour d’appel fait un raisonnement chronologique pour écarter la nullité, retenant que la convocation à l’entretien préalable, et donc la possibilité du licenciement, était antérieure à l’action en justice du salarié. 

La décision est censurée par la Cour de cassation. L’employeur reprochait au salarié d’avoir saisi le juge afin de masquer ses fautes… le licenciement était donc en lien avec l’action en justice.

Cass. soc., 17 janvier 2024 n°22-15.147