Primes aux salariés non-grévistes et discrimination

Suite à une grève de quelques mois dans l’entreprise, l’employeur annonce qu’il sera versé une prime exceptionnelle à certains salariés non-grévistes, attribuée « selon une surcharge exceptionnelle de tâches confiées à certains collaborateurs. Cette prime n’est pas liée à un résultat 2018 mais à des efforts supplémentaires durant les quatre derniers mois fournis par certains collaborateurs en dehors de leurs tâches habituelles. »

S’estimant victimes de discrimination dans l’exercice de leur activité syndicale et de leur droit de grève, les salariés et un syndicat assignent, leur employeur devant la juridiction prud’homale pour obtenir le paiement, à chacun des salariés, de certaines sommes à titre de rappel de salaire correspondant à cette prime exceptionnelle et de dommages-intérêts pour manquement par la société à ses obligations d’exécution loyale et de bonne foi du contrat de travail, et au syndicat d’une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour atteinte aux intérêts collectifs de la profession.

Ils obtiennent gain de cause devant le Conseil de Prud’hommes, qui considère que le pouvoir de direction permet à l’employeur de modifier unilatéralement les conditions de travail des salariés, que les salariés non-grévistes ont exécuté les tâches demandées conformément aux ordres de l’employeur et que ce dernier leur a donc accordé un avantage salarial de manière discrétionnaire.

Pour la Cour de cassation, il n’y a pas de discrimination dans la mesure où la prime n’a été versées qu’aux seuls salariés non-grévistes ayant accepté une modification temporaire de leur contrat de travail, en raison de l’exécution par eux de tâches ne relevant pas de leurs fonctions, de sorte qu’elles constituaient un surcroît de travail.

Cass. soc., 3 avril 2024, n°22-23.321